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4.7.11

Auguste Blanqui (1805-1881): «L’univers se répète sans fin et piaffe sur place. L’éternité joue imperturbablement dans l’infini les mêmes représentations ».

Je m’inspire d’objets archéologiques concrets ainsi que de sites de chantiers de fouilles, de mythes archéologiques, d’interprétations subjectives d’archéologues, de faussaires d’antiquités... Toutes les pièces que je réalise font partie d’un laboratoire de recherche sur l’art et l’archéologie appelé OG AB AS. J’ai la conviction que l’art, l’anthropologie et l’archéologie s’éclairent réciproquement. M’inspirer de la philosophie de l’archéologie me permet de m’interroger sur la circulation des formes dans l’histoire de la représentation. Ce sont les formes du passé, qui réactualisées, rendent possible le passage de la forme dans le temps. Chez Nietzsche c’est dans la notion de l’éternel retour que le monde persiste, que le temps est cyclique et où la ressemblance de phénomènes se reproduit à l’infini. La Ressemblance formelle participe du phénomène d’éternisation et permet la survivance de la forme. Aby Warburg chercha à déplacer dans le temps et dans l’espace des figures ayant des similarités formelles. Cette méthode de travail lui permit de tout prendre en compte dans un même mouvement sans hiérarchiser les formes.
Mes prochaines pièces exprimeront plastiquement le processus de répétition dont parle Louis Auguste Blanqui qui, après avoir admis que le temps et les événements se répètent, affirme que «l’heure de nos apparitions est fixée à jamais et nous ramène toujours les mêmes». L.A. Blanqui explique le retour des choses comme un probable problème mathématique. «Pour créer, la nature n’a que cent corps simples à sa disposition. Une fois toutes les combinaisons épuisées «quand il ne reste rien au fond du sac, elle ouvre la boîte aux répétitions (...)». il s’agira de créer une série d’objets et de dessins qui copieront l’objet, la nature. J’utiliserai le moule (en silicone et l’exposerai comme objet vecteur de création, l’alginate me servira pour les objets plein, tirage en plâtre) et l’empreinte afin de participer à l’idée que le recours aux répétitions est indispensable. Le modèle ici l’évolution d’une forme dans le temps questionnera également la pratique de l’art d’aujourd’hui. Quels sont les modèles de l’art contemporain? car si tout objet a un prototype, un modèle, si du tigre aux cités babyloniennes tout est inscrit dans les constellations céleste, ce moule que Platon appelait la Mimesis exprimant les différentes formes poétiques de la représentation sont infinies et nécessaires. Cette répétition cyclique m’amène à penser l’image, le rite, et le geste archaïque comme point de comparaison tangible avec ce qui survit aujourd’hui. En effet la notion de copie, comme participant du phénomène de répétition introduit la pratique de l’artiste faussaire comme capteur et acteur du retour des modes. L’art se nourrit-il du recommencement et pourquoi ? C’est en m’appuyant sur les relations sensibles entre les différentes trajectoires que prend la forme, les réseaux qu’elle crée, les points d’articulations entre les époques, les éventuelles ruptures, que mon travail questionne la reprise de la forme.
Recycler, s’approprier, reconstituer sont les moyens que j’utilise pour travailler. La reconstitution est généralement utilisée à des fins d’études scientifiques, historiques, anthropologiques, archéologiques. Je pense que cette méthode a pour conséquence de permettre la résurrection d’une pratique, d’un objet, d’invoquer un temps passé. Utiliser les formes du passé comme outils permet de s’interroger sur l’idée même de transmission, d’héritage. Redonner à une image son volume c’est se poser la question de l’original, faire revivre un geste fossile c’est rendre compte du réel de cet événement. Quand Penone avec Être fleuve sculpte à l’identique une pierre roulée dans les eaux depuis des milliers d’années, il interroge le temps, et le lien tangible qu’il existe entre la nature et l’art. Si le mythe de l’éternel retour me permets de croire à l’idée d’avancée esthétique, comment le progrès, synonyme de changement, cohabite-t-il avec la création cyclique que je cherche à créer , évoluant dans une continuité répétée ? En résumé je cherche à montrer par mon travail plastique que ce qui, à chaque époque, semble le plus moderne, est précisément ce qui est le plus archaïque. Quelle forme “descend” de quelle autre ? Quel modèle pour quel objet ? L’ hypothèse de la filiation servira à mettre en doute l’idée que l’artiste est maître de sa création (Otto Pächt) au profit de la pensée de Nelson Goodman selon laquelle « pour construire le monde comme nous savons le faire, on démarre toujours avec des mondes déjà à disposition ; faire, c’est refaire » .

Argile, Plâtre, 110 x 15 cm et dimensions variables, 2011. « Toute fabrication est un dialogue entre le fabriquant et la matière » (A. Leroi-Gourhan, Le geste et la parole vol. 2, 1965



Scapulomancy
, Omoplate divinatrice de Mammouth sans inscriptions, plâtre, 100 cm x 60 cm, 2011


Paysage Archéologique
, Boîte en bois, terre et mesures, 100 cm X 90 cm, 2011. Réduction de chantier de fouille.


Jeux, Série de photographies modifiées, imprimée sur papier, 173 x 150 cm, 2011

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